Les
biffins des temps modernes.
Jadis, on les appelait des chiffonniers. Dans les
grandes villes comme à Paris, on les voyait poussant un landau rempli
de vieux vêtements qu’il revendaient au marché aux puces. Avec l’arrivée des
fripes bon marché fabriquées en Asie que l’on jette à peine portées, la biffe
est devenue une industrie à part entière. Exit le clochard livré à lui-même, place aux
entreprises solidaires dans la collecte et le tri ; elles ont pour objectif de le réinsérer. Cette activité s’est
offerte un lifting, et une honorabilité mais qu'en est-il sur le terrain? Il semblerait que pour la bonne cause on se batte encore comme des chiffonniers....
Répondant
favorablement au souhait du département de la Manche d’accueillir le
Relais sur son territoire afin d' y construire un centre de tri de déchets
textiles, je ne m’attendais pas à engager un bras de fer avec les
industriels de ce secteur. Tout
semblait pourtant clair, le Relais
est une société bien connue dans le monde de l'insertion; son implantation dans
le Sud Manche n'a rien de concurrentiel. Son projet n'ayant comme autre
objectif d’être au plus près de son gisement et de décongestionner son centre
de tri d'Acigné ( 35) . Du coup, la Manche pouvait se targuer de lutter contre
l'exclusion en ralentissant la progression constante du nombre de bénéficiaires
du RSA. Son coût représente tout de même 10% de son budget
annuel… tout en participant au développement durable avec le recyclage des
déchets textiles dont seulement 20% du gisement est exploité. Une équation
simple, que n’importe quel économiste sensé est capable de comprendre. Enfin,
c’est ce que je croyais, d'autant que d'un côté, il y a l’État qui prône à grand renfort
d’annonces la nécessité d'être solidaire pour réduire le chômage. Hélas de l'autre, il arrive que des individus n’aient qu’une vision comptable de la misère. L’appât
du gain, passe parfois avant l'intérêt des individus et des territoires.
Dès mes premières rencontres fin 2013 avec les élus
responsables de l'insertion par l'économie, puis avec les services de l'État en
2014, je pressentais déjà quelques craintes des uns ou des autres de voir une
concurrence s'installer par rapport à Normandie TLC (ex COBANOR), une société de même nature que le Relais,présente sur
le département voisin du Calvados, laquelle bénéficie d'un large soutien de la Région et l'État, par
l'octroi d'emplois aidés (80% des salariés). Inquiétudes incompréhensibles, dans la
mesure où cette société ne collecte que 3200 tonnes de textiles sur
un gisement normand de plus de 35000 tonnes. Certes,
nous avons déjà assisté sur nos territoires à des concurrences entre
associations intermédiaires soucieuses de se développer mais nous sommes là seulement face à l'ambition d'une structure d'obtenir le monopole dans sa Région au risque d'appauvrir certains de ses territoires.
La solidarité n'est pas un jeu; l’on ne peut jouer avec
la misère et la précarité.
Toujours est-il que nous sommes en 2015 et que
le centre de tri demeure à l'état de projet, alors que la collectivité
s’est engagée pour concevoir les constructions de bâtiments et évaluer leur
coût pour permettre au Relais d’établir son business plan, comme il le lui
était demandé par la Direccte ( direction régionale des entreprises et de la
concurrence).
Patatras, les données ont changé. « Il est devenu nécessaire de faire une
étude pour analyser l'impact de l'arrivée du Relais dans le Sud Manche ».
C’est nous prendre pour Candide, pour ne pas dire autre chose, quand on
sait que le gisement de textiles est loin d'être exploité par cette ambitieuse société
caennaise. Prévue initialement au
premier trimestre 2015, pour un résultat en mars, les choses se présentent mal
puisqu'on apprend que cette étude n’est pas encore lancée. Cerise sur le gâteau, le Relais devra répondre
à un appel à projet pour 2016. Et voilà comment le département de la Manche en
est venu à organiser une rencontre entre tous les partenaires le 20 mai
dernier. Une réunion que le président de Normandie TLC demandait d'annuler. À
quel titre ? J'ai du manqué un chapitre. Pour autant voilà une attitude qui en dit long...
À
l’issue de cette journée, les participants sont repartis rassurés avec la
promesse de proposer ce projet au
CDIE de décembre 2015 où l'État et le département sont présents. Si un
accord est conclu, il restera à la Direccte à partager ses moyens pour
apporter son aide en permettant la création de 20 emplois
solidaires (50% au lieu de 80)... Si l'État bien sur les
lui attribue. Je sais, ça fait beaucoup de si pour la Communauté de communes et
les manchois qui devront encore attendre encore près de 18 mois pour travailler
au centre de tri textile du Sud Manche... Si entre temps le Relais ne
renonce pas... En attendant, le RSA a encore de beaux jours devant lui. On a prévu 8% d'augmentation au budget 2015 du département... 4 millions de plus!!!
question importante pour le département qui ne dispose pas suffisamment de sociétés insertion; l'Etat se doit d'être neutre et équitable dans ses aides; le Calvados et mieux servi que la Manche d'une manière générale JH.L
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