Les discussions du bout de l'an dérivent bien souvent sur des questions politiques ou sur la qualité, le pouvoir et le bilan des élus, laissant la plupart du temps, sur leur faim, des débatteurs qui se retrouvent autour du verre de champagne et des voeux de bonne année. A l'analyse, il est évident qu'il n'est pas simple de se comprendre car les attentes des uns et des autres, à l'égard de leurs élus, ne se situent pas sur les mêmes créneaux. Quant à comparer les hommes, il faut également savoir relativiser en fonction des niveaux.
Toute mesure est relative. Le poids, même au figuré, est également relatif. Le passage d'une strate municipale à celle d'une collectivité territoriale, département ou région, ou bien encore à la strate nationale crée évidemment une rupture qui peut transformer le 1er de la classe en bon dernier de la promotion, même s'il sait donner le change sur le terrain et se valoriser par des poignées de main utiles et compensatrices.
A l'Assemblée ou au Sénat, entre les chefs de parti et les élus lambda, il n'y a pas photo. Il arrive que l'existence d'un député local se construise sur son charisme, sa créativité et ses idées, son expérience, son entre jean et son relationnel et, bien évidemment et fort heureusement, sur sa capacité à comprendre et à s'investir, sans se compromettre, sur des questions économiques nationales et internationales. Tout cela ne donne pas pour autant un bilan. Qu'il soit national ou local, un élu a des comptes à rendre à ses électeurs. Jugeront-ils de son poids national ou de ce qu'il aura apporté à ses concitoyens? L'un peut-il aller sans l'autre?
Ce n'est guère évident. Nous l'avons constaté avec Pierre Méhaignerie qui à réussi à garder le tribunal de Fougères; de même, l'entente Fillon-Legrand n'a pas été pour rien dans le soutien du gouvernement au projet numérique du département; de même les relations nationales de Philippe Bas ont sorti Jean Bizet d'un mauvais pas pour la création de sa maison Alzheimer, dans l'ancien collège du Teilleul : sans investisseurs rien n'eût été possible... c'est le poids de ces élus qui a compté. D'autres cantons en ont également profité lorsque cela a été nécessaire, Brécey comme d'autres.
Ce qui vaut au niveau national a aussi son importance au niveau d'une collectivité départementale ou régionale, à ceci prés que votre expérience et vos réussites dans votre profession ou dans votre mandat d'élu local peuvent contribuer à vous faire reconnaître et écouter. C'est d'ailleurs l'une des raisons de mon total désaccord avec la réforme des collectivités. Le mandat de conseiller territorial qui remplacera le conseiller général et le conseiller régional est une grave erreur. Nous aurons désormais des élus politiques dont les attaches avec le terrain seront très réduites à moins de retomber dans le cumul des mandats. Jean Bizet le sait; il ne pouvait être partout, en tout cas très très rarement au conseil général. Inévitablement, la politique locale en subit les conséquences. Personne n'a le don d'ubiquité.
Quel bilan un conseiller général devenu conseiller territorial sur un territoire beaucoup plus grand et discontinu pourra t-il donner demain à ses électeurs? Sur quels critères ces électeurs le choisiront-ils? Plus le territoire sera étendu, plus ils deviendront politiques, qui plus est si le mode d'élection n'est plus uninominal. Cela pourrait très vite arriver. L'objectif politique de Nicolas Sarkosy de faire revenir à droite plusieurs régions deviendrait alors rapidement une vue de l'esprit.
Tout ceci nous entraîne bien loin du poids des élus... celui de l'expérience, celui des valeurs que l'on oublie trop souvent, celui des résultats, celui du travail également et du dynamisme. Assurément, nos territoires en supporteront les conséquences et, plus particulièrement, nos territoires ruraux qui n'auront plus que leurs élus locaux pour se faire entendre. Pourvu que cela dure, sinon lorsque Nicolas et Carla ne seront plus au sommet de l'affiche, les repas du bout de l'an risqueront de devenir bien monotones s'il n'est même plus possible de parler du poids de ses élus de proximité.
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