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dimanche 28 juin 2015


 À l’Ouest, nucléaire et solidaire ne vont pas de pair

Comme bon nombre de départements normands, la Manche a beaucoup donné à la France; en particulier lors de la seconde guerre mondiale avec  le débarquement du 6 juin 1944 et la bataille de Normandie qui a suivi tout au long de l’été. Une terre ravagée en l’espace de quelques mois avec un exode spectaculaire des populations qui ne retrouvèrent plus rien à leur retour comme à St Lô  rasée à plus de 80%. Pour autant, les manchois ont toujours relevé la tête. C’est dans leur nature :   prendre le temps pour se sortir sereinement d'un mauvais pas.


Nos voisins bretons ont d'autres méthodes pour arriver á leurs fins. La crise agricole avec Gourvennec les fit découvrir au cours des années 60. De plus, la Bretagne  a eu cette chance d'être  âprement défendue par les barons du gaullisme:  Olivier Guichard, Yvon Bourges, Edmond Michelet, Pierre Lefranc en tête, mais aussi le MRP avec René Pleven. Ce lobbying opéré par ces fidèles du gaullisme vit naître un véritable plan Marchal pour désenclaver la Bretagne. Un plan routier fût mis en place  au début les années 70 donnant ainsi une vingtaine d'années d'avance à la Bretagne par rapport à la Normandie. et à la Manche qui en aurait eu grand besoin. Dotée d'un tel cadeau nous pouvions penser qu'une centrale nucléaire pouvait être implantée à Plogoff afin de procurer á la Bretagne l'énergie dont elle avait besoin. C'était ne pas comprendre l'esprit autonomiste de la région avec le FLB dans les années 70... Recevoir oui mais donner à la France : non. C'est ainsi, on est d'abord breton avant d'être français. Pas de problème du côté des manchois, habitués à accepter sans rechigner. Prenant de plein fouet la crise pétrolière, Giscard d’Estaing, fraîchement élu au printemps 1974 va leur offrir la Centrale de Flamanville qui, somme toute, va de paire avec l'usine de retraitement du plutonium de La Hague dont la construction commence en 1962 pour etre mise en service en 1966.

Une construction bâtie par décret

La Hague en 1962. Source Wikipedia
Pour leur faire avaler la pilule d’iode, les ingénieurs qui se répandent sur le terrain pour évaluer la faisabilité du projet du CEA répondent aux riverains qui s'interrogent qu'il serait question de l'implantation d'une entreprise d’électroménager.   En 1969, Robert Galley, alors ministre chargé de la Recherche scientifique et des questions atomiques et spatiales décide de transformer l'usine en Centre de stockage Manche de déchets nucléaires (CSM) géré par l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra).  À Flamanville, la construction de deux réacteurs nucléaires provoque tout de même une forte opposition des antinucléaires entre 1974 et 1978. Qu’importe, les réacteurs sont mis en service en 1986 et 1987. sur le site d'une mine de fer où les enfants se rendaient avec leurs enseignants pour  ramasser la magnétite. Pour éteindre le feu et montrer la bonne volonté de la population, on organise toutefois 1975 une consultation publique  à Flamanville. Le résultat est sans appel : 63,7% des Flamanvillais se prononcent en faveur de l’implantation de la centrale nucléaire. Les manchois, je vous le disais, sont de bons citoyens. N'ont ils pas d'ailleurs soutenu leurs élus pour réclamer la construction du dernier modèle d'EPR au détriment de Penly en Seine Maritime.

Des efforts non récompensés

Avons nous tiré profit de nos accords avec les gouvernements d'alors? Certainement une belle médaille de citoyenneté, et le silence assourdissant de ce cher Léon Jozzeau Marigné, au palmarès cumulé impressionnant : Sénateur maire d'Avranches, président du Conseil Général, président de la commission des lois au Sénat, membre du Conseil Constitutionnel. Le jour de la distributions des prix il devait être ailleurs. On roule toujours à 90km/h ou à 110km/h pour rejoindre le Cotentin, et il a fallu plus de trente ans pour rallier Caen à Rennes par l’autoroute. Je ne parle pas du contournement d’Avranches que le département de la Manche, présidé par Pierre Aguiton, avait obtenu en acceptant de mettre 500Millions de francs au pot  pour que l'État  termine d'abord l'A84. Quand au fameux TER ( Toujours En Retard ) Paris-Granville avec la modernisation promise des voitures, n'en parlons plus. Oublions également le TGV qui devait desservir  Cherbourg ou  le Mont Saint Michel. 
« Circulez, ya rien à voir » disait Coluche. Pas plus l'État, que la Normandie n'ont ces projets dans leurs cartons. En attendant une seconde ligne THT de 400000volts balafre le bocage du Nord au Sud de la Manche pour apporter de l'énergie à la Bretagne  toujours immaculée de toute dégradation.

Le beurre ( normand) et l’argent du beurre.

La Bretagne a dit non à la centrale nucléaire et à ses lignes haute tension qui défigurent le paysage. Mais on ne l'entend plus lorsqu 'il s'agit de partager les recettes. Jamais en retard d’une revendication, les bretons lorgnent comme bien d'autres français sur  la taxe professionnelle que le département de la Manche et ses communes perçoivent en compensation  des risques nucléaires. En France, depuis Tchenobyl, on a appris que l’on pouvait maîtriser un nuage nucléaire. Fadaises, demandez aux Corses ce qu’ils en pensent… Quant à la catastrophe de Fukushima elle n'a pas encore dévoilé ses dégâts collatéraux. Mais revenons à nos moutons normands que l'on tond si facilement. Tout d'abord, rappelons que, voici quelques années, AREVA avait "arrangé" ses comptes en jouant sur la durée de ses amortissements. Résultat: Le budget du département avait été amputé de 15 millions€. Et ce, en dépit de la plainte déposée à l'époque par Jean François Legrand. Aujourd'hui, l'heure étant à la solidarité, l'ÉTAT ne manque pas de piocher dans la caisse en réduisant largement ses dotations aux communes riveraines. Et il veut aller encore plus loin : toutes les communes de la Manche  seront privées des ressources du Fonds Départemental de Péréquation de la Taxe Professionnelle ( FDTPH ) provenant de l'écrêtement des taxes professionnelles de l'EPR et de l'usine de la Hague. Bernard Caseneuve a fait retarder l'échéance mais c'est reculer pour mieux sauter en 2016 voire en 2017.  Les ressources de ce fond disparaîtront bel et bien à terme pour alimenter une Caisse nationale de péréquation. Ce n'est pas une mince affaire... En 2014, 7 164 163€ ont été distribués aux communes défavorisées selon le critère : " charges d'annuités d'emprunt par habitant"... 2.013 672€ ont été réservés aux intercommunalité en fonction de leurs dépenses réelles d'équipement constatées au compte administratif de l'année précédente (2013 pour les exemples donnés ci-après) et 131 057€ selon le critère  "importance des charges"


Les manchois ... Gros-Jean comme devant...

Le manque à gagner pour les collectivités manchoises concernées (quasiment toutes) sera considérable  car la suppression du FDTPH viendra s'ajouter à la réduction des dotations de l'État.  A titre d'exemple, la commune de Cherbourg a perçu 1 126 833€ en 2014, Granville et Saint Lô autour de 450000€. Avranches, Carentan,Equeurdreville, Tourlaville, Valognes plus de 200000€. Pour Coutances, Isigny le Buat et Saint Hilaire du Harcouet la perte dépassera les 100000€ etc.  Brecey,Mortain, Sourdeval et Thorigny sur vire subiront le même sort avec 35000€ en moins dans leur budget. Que dire des  communautés?  La CUC cherbourgeoise perdra 734007€ , Saint-Lô agglomération 112 681€ m... La communauté de communes du Val de Sée qui s'investit beaucoup dans l'économie avec ses 10000 habitants seulement devra compenser une perte de 111838€... Petite lumière d’espoir si le producteur de tomates s’implante à la fin 2016 et que la suppression du FDTPH ne devienne pas effective avant les élections de 2017.
Que l’on ne vienne pas nous chanter les louanges des profits du nucléaire.  Nous avons été solidaires de notre pays et nous le serons encore lorsqu'il le faudra.. Nous le serons aussi au sein de la Normandie. Mais par pitié, qu’on cesse de nous prendre pour des imbéciles. Cessons de nous laisser enfumer par des élus qui ne savent contester que lorsque le mal est fait. Aux dernières nouvelles, Ségolène aurait promis un référendum  à propos de l'arasement des barrages ( ouest France du 19 juin). Sauf que dans ce cas de figure un tel référendum est illégal. Et vlan.  Au moins, elle a eu la franchise de  l'écrire dans un courrier parvenu le 24 juin dans le Sud Manche ? En revanche elle ne nous dit rien de plus sur le projet sinon qu'il faudra engager la vidange du lac de Vezins avant le 31 décembre 2017, 2030 pour celui de la Roche qui Boit lequel dépend toujours d'EDF. Rien sur l'après vidange; rien sur les financements et pour cause... Il serait question de créer un EPTB, Établissement Public Territorial de Bassin auquel l'État n'entend pas adhérer... Et pour cause c'est l'EPTB qui prendrait en charge les équipements du Mont Saint Michel (2millions d'€ de fonctionnement annuel) les SAGES des fleuves côtiers dont celui de la Sélune bien entendu avec tous les travaux de l'après barrages. Pourquoi pas ? l'EPTB sera en mesure de lever l'impôt. Á savoir si les bretons entreront dans l'EPTB avec Rennes qui est également concerné. Ce serait différent. Une chose est sûre, ce sont des questions dont Il faudra parler avant les élections régionales.




9 commentaires:

  1. Anonyme6/28/2015

    un bel (même long) inventaire de ce que nous supportons depuis longtemps. La Manche, on ne la connaît que par le nucléaire. Il ne se passe pas une semaine sans qu'on nous rabatte les oreilles avec la centrale. Oui, notre département est défiguré par les lignes électriques, et maintenant les éoliennes. Qu'avons nous comme compensation? Il serait temps que notre nouveau président fasse preuve d'initiative.

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  2. Anonyme6/28/2015

    Sans compter que ma belle fille va devoir aller travailler en Bretagne, son entreprise de couture quittant prochainement le Sud Manche pour Louvigné du Désert. Ch.R.

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  3. Ouest France de ce jour commente la lettre de Ségolène Royal. Une bonne analyse qui compare également avec ce qui se passe en Bretagne: Deux poids deux mesures!

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  4. Anonyme7/02/2015

    Pourquoi ne pas demander à St James de nous tricoter des bonnets rouges?
    Plus sérieusement, il faut un leader dans la manche pour peser sur des décisions et des déclarations irreflechies. Prenons notre avenir en main. Mais je rêve, les normands n aiment pas les remous. P tête ben que oui, p tête ben que non

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  5. Anonyme7/02/2015

    Pensez vous; il ne faut pas se faire d'illusions pour les barrages; une fois que la vidange va être lancée on pourra considérer que l'affaire est terminée sans négociations ce qui veut dire que ce sont les contribuables locaux de la communauté d'Avranches Le Mont Saint Michel qui devra payer pour relancer l'économie et trouver de nouvelles orientations au site de la Mazure qui sera immobilisé pendant au moins 5 années ... 3o personnes risquent de perdre leur emploi. Pas étonnant que des élus locaux s'interrogent sur ce fameux référendum sans valeur aux dires de Ségolène. Marcel G.

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  6. Le président de la communauté de communes d'Avranches prendrait un risque en posant la question pour ou contre l'arasement; s'il maintient le référendum la question devra être plus subtile. Encore faut-il que son conseil soit d'accord; c'est moins sûr. De plus que voudrait dire un referendum qui ne concernerait pas tous les riverains de la Sélune? Une chose est sûre,Ségolène Royal a dupé beaucoup de monde.

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  7. Anonyme7/02/2015

    Parce que vous croyez dans la parole d un politique, c est de la naïveté ou de l incompétence

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  8. Je ne suis pas naïf... Pour l'incompétence tous les individus ont leur seuil de peter, seuil différent selon les domaines. On est plus fort pour agir quand on connaît ce seuil. " Connais toi toi-même" Socrate

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  9. Anonyme7/03/2015

    C'est tout de même bien joué. En définitive ce sont les élus qui donneront le sentiment de décider de l'avenir des barrages. S'ils refusent le référendum,c'est qu'ils ont accepté d'araser alors que Segolène ne semble pas l'imposer. Si le referendum a lieu, ce sont les électeurs qui seront piégés. Non á la question posée ce sera dire non aux financements de la communauté donc á l'arasement... Bien joué mais bonjour les conséquences. Diviser pour régner on ne pouvait faire mieux en machiavélisme.

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