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samedi 10 mai 2014

Départements et démagogie politique


huffingtonpost
Fort de ses 18% d’opinion favorable, le capitaine Hollande navigue à vue obligé de lâcher des leurres pour brouiller les pistes. Alors, pourquoi pas s’attaquer à la réforme des départements dans la foulée de cette « valse » de réformes territoriales, histoire de nous démontrer qu'il n'est pas qu’un capitaine de pédalo et peut barrer le navire France. Un pari audacieux qui n’est pas dans sa nature.  Oui mais voilà, Manuel Valls, a su rapidement improviser en prenant à contre pieds la vox populi au lendemain de la défaite du parti socialiste aux municipales, et mettre une voile au pédalo avant de le placer dans les vents dominants. Se jeter à l'eau avec la réforme des collectivités territoriales et cette exception française qu'il a souvent défendue lorsqu'il il était dans l'opposition n'était pas sa priorité.  Dés le début de son quinquennat, il a même pris les vents contraires en  revenant sur le conseiller territorial  de Sarkozy et en augmentant le nombre de matelots des conseils généraux. Aujourd'hui, le voilà qu'il veut les supprimer en 2021. Quel cap va t-il choisir ? 

Pour mémoire, Le département est une division administrative, mise en place sous la Révolution française le 15 janvier 1790. L’objectif était à l’époque de remplacer les provinces liées à l’Ancien régime et de casser tout provincialisme. Afin que l’autorité administrative soit rapidement informée de ce qui se passait à l’autre bout du département, le  principe était qu’ un émissaire à cheval devait pouvoir atteindre n’importe quelle zone du territoire en une seule « journée de voyage ». C’est ainsi qu’aujourd’hui, les superficies de chaque département sont très proches. Depuis 1985 et la loi de décentralisation, le département est également une collectivité locale dirigée par un conseil général renouvelé par moitié tous les trois ans.. Les transferts de compétences de l’Etat aux départements se sont multipliés au fil des ans avec notamment le 1er décembre 1988 la prise en charge d’une partie de la politique du RMI ( aujourd’hui le RSA ) puis de nouveaux transferts organisés par la loi d’août 2004. Ses compétences s’exercent aujourd’hui sur les collèges, les routes et sur de nombreuses aides sociales comme l’APA (autonomie des personnes âgées). 

la suppression des départements un serpent de mer…
Ce n’est pas faute que beaucoup s’y soient essayés. À commencer par Clemenceau lui-même en 1906 qui prononça un discours à Draguignan, ( VAR)  dans lequel il préconisait d’adapter la carte des collectivités locales en tenant compte de l’évolution des réalités économiques et sociales. Il faut attendre 1947 avec Michel Debré qui proposait de créer 47 grands départements. Vient ensuite Valéry Giscard d’Estaing, le seul à  porter un bon diagnostic en indiquant qu’« un jour il faudrait choisir entre la région et le département car il ne saurait y avoir entre l’Etat et la commune deux collectivités intermédiaires ». Mais, comme ça venait de Giscard on a préféré attendre 1982, avec le lancement de la  loi de décentralisation du génial Pierre Mauroy et du non moins Gaston Defferre lesquels envisageaient pas moins la suppression des départements avant que François siffle la fin de leur amateurisme en s’y opposant fermement. Les années passent; le projet reste dans les cartons jusqu’en 1995 avec la loi Pasqua qui introduit la notion de « pays », bassin de vie et d’activité susceptible de rapprocher les collectivités autour de projets économique de territoire, sans que  le pays n’y gagne en compétence juridique. Du coup  les départements ont été conservés. Sous la présidence de Jacques Chirac, Jean-Pierre Raffarin initia « l’acte II de la décentralisation ». Cette fois c’est décidé, dans la foulée du discours du grand Jacques prononcé à Rennes en  avril 2002 qui dénonçait la pléthore de niveaux de collectivités locales en France, il échafaude l’idée que l’armature territoriale française devait reposer sur le couple Etat-Région. Plouf plouf…Les grands projets et les envolées de Chirac sont restés lettres mortes. Alors, une question se pose, pourquoi maintenant? Et pourquoi   Hollande, réputé si pusillanime, se jette t-il dans cette odyssée sinon pour tenter de retourner à l'Elysée  dans trois années et y retrouver Pénélope.
Une réforme nécessaire
Il sait que tout le monde s'accorde sur la nécessité de couper la queue de ce serpent de mer que constitue le nombre de communes... Plus de 36000 dont 31500 ont moins de 2000 habitants, alors que l'Italie et l'Espagne en ont 8000 et l'Allemagne 12196 dont 75%  de moins de 5000 h. Sans fixer un nombre plancher à l'existence des communes on aurait pu tout de même espérer qu'il ait le courage de supprimer les 3608 communes de moins de 100 âmes. Ç'eut été courageux... Mais il a  préféré annoncer la suppression de tous les départements sans en connaître les conséquences. IL doit savoir, en tant qu'ancien président de Corrèze, que seulement 50% des budgets des conseils généraux, soit 26milliards, sont consacrés à l'action sociale depuis que l'État leur à refilé l'APA, 135,8 millions pour le conseil général de la Manche et le RSA (ex RMI) ,42,3 millions sur un budget de fonctionnement de 443,02 millions d'€ ... Ajoutons l'enfance et la famille, 46,7 M€, la jeunesse 14,7M€  et la sécurité avec les pompiers, 23,4 M€ et l'on atteint les 60% du budget autant de dépenses qui ne cessent d'augmenter. Il doit savoir également que 72% des investissements de la France sont le fait des collectivités dont 1/3 effectués par les départements  qui ont en charge les routes, les ports (330kms de côtes pour la Manche) et toutes les infrastructures et réseaux : 127,02 millions d'€ soit 22,3% du budget total du département de la Manche qui n'appartient pas à une métropole et doit se suffire à lui-même. De grâce, ne mettons pas toutes les collectivités dans le même sac sous prétexte de vouloir se refaire une santé politique sur le dos des départements ruraux. Bien sûr, on nous promet  plus de proximité avec de plus grandes communautés de communes à qui on confierait tout le social. Le problème c'est que proximité n'est pas synonyme d'égalité. Le département de la Manche est un département vieillissant qui nécessite un aménagement de son territoire homogène en capacité d’hébergement de personnes âgées... Quant à penser que cela générerait des économies, on se met le doigt dans l’œil quand on sait toutes les demandes d'augmentation des budgets de ces structures que doivent gérer les services du département. La proximité est une nécessité pour écouter et pour comprendre mais la solidarité territoriale ne peut se faire à la seule analyse de ses propres besoins. Entre le Mortainais et la Hague qui bénéficie de l'argent du nucléaire nous arriverions vite à des disparités incompréhensibles alors que la précarité augmente dans les régions déshéritées dont la modération des loyers est souvent largement compensée par les dépenses d'énergie et de mobilité. Nous ne sommes pas une métropole, les transports publics sont quasiment inexistants pour se rendre sur son lieu de travail.

Certes, la France a besoin de réformes en profondeur mais le chant de la cour des comptes est préférable à celui des sirènes. Elle annonce que 73% des dépenses des collectivités relèvent du secteur communal et estime, chiffres en mains, que la suppression de la clause de compétence générale disparue pour les départements et les régions en 2010 mais réintroduite par François Hollande via la loi de modernisation de la fonction publique territoriale adoptée à la sauvette le 19 décembre 2013, est la solution la plus rentable financièrement. La plus sûre et la plus lisible aussi. 
Je crains que tout ceci ne se termine par des décisions prises à la hâte, histoire de se refaire une santé après les nombreux couacs de ces deux dernières années. Quand à parier que ces nouvelles orientations seront de nature à faire remonter Hollande dans les sondages, je ne m'y risquerais pas et ne  mettrais pas mon département à couper .

12 commentaires:

  1. Anonyme5/10/2014

    Tous les politiques de droite comme de gauche font de la surenchère sur cette question. Les fonctionnaires territoriaux ont de quoi s'inquiéter... Les électeurs s'y laissent prendre... On tombe sur la tête. A.C

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  2. Anonyme5/10/2014

    Face à l'incapacité d'apporter des réponses à la compétitivité économique de la France, la réforme territoriale est un écran de fumée politique comme l'a été la loi sociétale sur le mariage pour tous.
    Et le conseil régional de Basse-Normandie se précipite pour tout donner aux hauts-normands et essayer de dresser un écran de fumée devant le bilan de mandat avant les prochaines élections régionales !
    Bik

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  3. Anonyme5/11/2014

    Ce serait un comble que ce président laisse son nom dans l'histoire pour une telle réforme...

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  4. Il y a beaucoup d'opposants à une telle réforme à droite comme à gauche. Et puis d'ici 2021, il y aura 2017. En revanche, avoir charcuté les départements pour faire de nouveaux cantons et des candidatures doubles, un homme, une femme pour seulement une mandature est incohérent. Il ferait mieux dans ce cas de revenir en arrière. Tout cela manque de sérieux

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  5. Anonyme5/11/2014

    un sondage de l'ifop ce mois ci révèle que La majorité (55%) des Français, hors Paris, est favorable à la suppression des conseils généraux, et que 61% des Français ne connaissent pas le nom du président de leur conseil général.
    61% ne connaissent même pas le nom du président de leur département, un pourcentage qui monte à 76% chez les moins de 35 ans. Alors, oui, il est temps de remettre à plat tout ça...

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    1. Anonyme5/12/2014

      Et combien connaisse le nom de leur président de Région ? le nom de leur député européen ? le nom des différents ministres et secrétaires d'Etat ? le nom de leur président d'intercommunalité ?....
      Ce n'est pas en supprimant le symptôme que vous guérirez le malade

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  6. Ce genre de sondage ne veut rien dire. Il indique surtout que les citoyens ne s'intéressent pas à la vie publique. Demandez à 100 habitants qu'ils vous citent les adjoints de leur commune... Vous serez déçu. Ce sont pourtant des élus de proximité. Faites leur citer 5 ministres... Faites l'expérience... En connaissez vous la moitié vous même . Si oui félicitations. Quand à certains députés, s'ils avaient été bien connus, pensez vous qu'ils auraient été élus. Non vraiment nous devons étayer nos rèflexions sur autre chose que des sondages... Mais, je vous rejoins, il faut remettre les choses à plat.

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  7. Anonyme5/11/2014

    Et faire de l'instruction civique...

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  8. Anonyme5/11/2014

    Qui connait son conseiller régional ou le président de région?... Supprimons.. Combien d'abstentions aux élections européennes? Supprimons... Qui est le président du pays du Sud Manche? Supprimons.. Combien d'électeurs de la communauté de communes du SOURDIN connaissent leur nouveau président? Supprimons... Combien savent ce que veut dire SOURDIN parmi les moins de 35 ans...?

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  9. Anonyme5/11/2014

    Allez, je vais donner du grain à moudre à votre contradicteur ... Combien d'habitants connaissent le nombre de sénateurs de la Manche et leur nom... Allez supprimez le Sénat... Cela pourrait faire plaisir à beaucoup

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  10. Anonyme5/12/2014

    La France est malade de son Etat.
    Victor Hugo appelait aux Etats Unis d'Europe. Il est temps de passer aux Régions unies d'Europe.
    Osons un Etat fédéral a minima franco-allemand fort...
    Autrement, revenons en arrière (fin de l'Euro avec le retour à la souveraineté monétaire, fin de Maastrich avec le retour à la souveraineté budgétaire, fin du parlement européen avec un parlementarisme national renouvelé...) mais ceci n'est pas le sens de l'histoire dans un monde où les vieilles nations européennes ne dominent plus.

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  11. Mauvaise manipulation pour le dernier message . Mes excuses

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