5,7, 8 ou 9 cases neuves pour la Manche?

 Généralement on ne prend pas au sérieux celui qui prend ses rêves pour la réalité en considérant qu'il plane dans l'illusion et qu'il oublie le réel. C'est ainsi qu'au nom d'un principe de réalité on condamne une telle attitude et on définit  l'illusion comme le fait de prendre ses rêves, ses désirs, pour la réalité. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur, ancien maire de Cherbourg, est l’archétype de l'élu qui sait transformer ses rêves en réalités, avec en plus un don extraordinaire pour passer de  l'idée à sa concrétisation. On doit admettre que c'est un fin stratège. Il nous montre en plus, sans qu'on ait eu besoin de réfléchir,  la différence entre la proactivité et la réactivité. La proactivité est la capacité innée à anticiper les évènements et à agir pour éviter leurs conséquences, encore faut-il posséder les savoir être et savoir faire. En gros, Bernard Cazeneuve est un Nostradamus des temps modernes et un homme d'action qui sait façonner le destin. Nous sommes des enfants de Coeur en face de lui.

De la suite dans les idées.

Il ne l'a jamais caché, son ambitieux projet a toujours été de récupérer le trésor qui alimente les budgets des communautés de Beaumont Hague et des Pieux qui abritent AREVA et EDF. Il en rêvait. Sauf qu’en ce qui concerne ces deux entités, les ambitions risquent d'être à la baisse. Avec un trou de 15 à 20 millions de pertes, AREVA n’est plus en mesure de  semer le fric à tout va comme du temps d’Anne Lauvergeon . Quand à EDF c’est l'entreprise qui va éponger les dettes, avec la serviette du contribuable. Qu’importe, dans le mic mac de  la réforme territoriale, qui  a permis de faire une commune nouvelle de la communauté urbaine composée de Cherbourg-Octeville et des communes riveraines pour arriver à 80000 habitants, Cherbourg pourra déjà puiser dans la Dotation de l'État sensée bénéficier aux Territoires  Ruraux (DETR). Il n'aura pas fallu plus d'une année pour atteindre l'objectif. Cerise sur le gâteau : une commune nouvelle ne pouvant rester seule, elle doit  intégrer une communauté dans laquelle elle ne peut avoir la majorité .
Le puzzle est mis en place, il ne reste plus qu'à y placer les pièces . Deuxième phase: Le ministre demande au préfet de faire de la Manche un laboratoire pour l'application de la loi NOTRe. Un laboratoire est synonyme d'expérience; tous les manchois auront -ils envie d'être pris pour des cobayes?  Cas unique en France, le schéma territorial de la préfète découpe le département de la Manche ( 500000 habitants) en 5 nouvelles communautés de communes, des méga cases dont celle du Cotentin qui pourrait rassembler 160000 habitants. La troisième phase est en cours... Les communes ont été consultées; la grande majorité a dit non au schéma; pour autant la CDCI composée de 45 élus (Commission Départementale de la Coopération Intercommunale) est en mesure de boucler l'affaire,  quitte à faire quelques concessions par-ci par-là  comme par exemple celle de passer d'une proposition de 5 à 8 ou 9 communautés de communes dont celle du Cotentin qui intégrerait les communautés de Beaumont Hague, Les Pieux et quelques autres communautés ravies de mettre le grappin sur la manne financière des riches voisins mais pour combien de temps ?  Le rêve deviendrait ainsi réalité avec l'accord du plus grand nombre et la bénédiction de St Bernard. Fractionné en 8 ou 9 communautés dont 4 de taille XXL, le département sortira t-il gagnant d'une telle opération?



 De la zone rurale au pôle rural



 L'inquiétude est grande   parmi les élus ruraux . Pour ma part, ayant toujours défendu l’idée qu'à toute chose malheur est bon, je pense qu'une communauté nouvelle de 75 à 90 000 habitants qui rassemblerait les cantons ruraux de l'Avranchin et du Mortainais serait peut être une opportunité à saisir pour l'avenir de ces territoires. À condition que les élus concernés mettent "leurs sensibilités " de côté et s'entendent pour structurer une gouvernance qui tienne compte de la proximité, de la réactivité et de la continuité nécessaires à la vie quotidienne des habitants et à la démocratie locale. Car même avec 90 000 habitants, seulement, on ne forme pas pour autant une structure homogène, chaque bassin de vie ayant son histoire, ses atouts et ses faiblesses. L'uniformité n' est pas un objectif à atteindre; en revanche celui de la cohésion est important. Il semble aujourd'hui que la volonté et la confiance soient réunies dans le mortainais et l'avranchin pour construire un projet solidaire que le Mont-Saint-Michel aura le pouvoir de rendre attractif. Mais pour y parvenir il faut tout remettre à plat et se retrousser les manches. Les discours et les bonnes intentions ne suffiront pas. 

Redonner de l'espoir et un pouvoir d'initiative aux populations

Nous avons le devoir de réussir en nous engageant dans une politique d'aménagement et de développement durable qui sache s'adosser sur un schéma de développement ambitieux de l'espace où les principes de cohésion sociale, économique et territoriale s'entendent entre pôle urbain et pôles ruraux. Se mettre autour d’une table en organisant des assises de réflexion avec à la sortie un vrai projet territorial de développement  est la condition pour éviter de creuser le fossé entre les territoires qui profitent de la proximité des pôles urbains et ceux qui n'en bénéficient pas du fait de leur discontinuité et de leur éloignement. C’est un gros chantier.

Le modèle polycentrique qui consiste à concentrer plusieurs centres de décisions dans une même organisation doit faire place à une approche multipolaire structurante qui permet au plus grand nombre de s'impliquer et d'enraciner le projet sur le terrain.  Ces  pôles ruraux ne peuvent se réaliser qu'autour d’une ambition politique commune et sur une communauté d'intérêts économiques et sociaux. Il s’agit alors de construire une œuvre collective issue d'un partenariat local et d'un travail en réseau en tirant profit des compétences de chacun dans un souci de coopération et d'efficacité. Un tel objectif nécessite de passer d'une hiérarchie verticale à un réseau horizontal. En clair, il nous faut tricoter un nouvel écheveau administratif qui soit coopératif et nous permette d’avancer. Je suis conscient qu’il s'agit là d'un vrai challenge, d'une révolution pourrai-je même dire. Mais rien d’impossible, le management collaboratif a su donner un nouvel élan aux entreprises en permettant à chaque membre d'une équipe de participer à chaque étape de la conception du projet et de sa réalisation. La France est-elle prête ? oui  les entreprises le démontrent tous les jours. C’est pas gagné car entre les mots, les intentions et les actes il y a parfois une grande distance. De plus une telle idée pour les baronnies du Sud - Manche relevait encore hier d'une utopie. C'était le 20ème siècle. Nous voilà entrés dans une nouvelle ère. Prions l'archange pour qu'elle soit celle de la sagesse.