Quel lycéen n’a
jamais entendu cette injonction paternelle. Une formule apparue dans la seconde
moitié du 20ème siècle à une période où la France avait besoin de
têtes pour se reconstruire. Cette expression a provoqué quarante années de
démagogie et de nivellement par le bas qui ont entraîné la France dans une
impasse; elle se traduit par l'embouteillage à l'entrée à l'université et le
départ de ses meilleurs éléments à l'étranger qui évitent ainsi un tirage au
sort idiot susceptible de les éliminer. Pour corriger cette ineptie, le
ministre J.M Blanquer explique que le baccalauréat "doit reprendre plus de
sens", ajoutant qu'il faut "en finir avec le bachotage". Il nous
annonce une sélection sur lettre de motivation et l'exigence de prérequis. Un
camouflet cousu de fil blanc par celui qui a passé son bac avec option couture
pour nous faire avaler une sélection qui ne dit pas son nom. Sélection qui fait
fi du potentiel des jeunes étudiants. Évidemment cette annonce est un bon alibi
pour des groupuscules, nostalgiques du grand soir qui ont besoin de se faire
les dents en s'engageant dans quelques actions violentes espérant naïvement
rallumer les feux de mai 68 en bloquant l’entrée des centres d’examens.
Sans soutenir ces blocages et leurs dégradations, nous sommes en droit de nous
interroger sur les nouvelles conditions d'entrée à l'Université . Ont-elles
réellement le caractère sélectif dénoncé par ces jeunes? Et comment faire
autrement pour éviter ce nombre d'échecs à l'université qui ne cesse de faire
grossir le nombre de jeunes bacheliers à Pôle Emploi? Sans formation réelle
après deux ou trois années d'enseignement supérieur beaucoup se retrouvent
inévitablement au chômage, une expérience souvent mal vécue dont il est parfois
difficile de se relever.
Analysons la
situation.
Comme l’a dit Luc
Ferry, pour ne pas avoir le bac, il faut en faire la demande. En 2015, près de 90% des lycéens deviennent
bacheliers: 91,5% ont le bac général, 90,6% le bac techno et 80,3%
le bac professionnel. L'objectif de Jospin étant d'atteindre 80% de réussite au
bac. Il peut se frotter les mains des dégâts qu’il a causés quand on voit les
étudiants payer la note de sa démagogie. Les problèmes de l'Université en
sont la conséquence car le nombre de bacheliers ne peut être le résultat
que du nivellement par le bas. Hier, le bac donnait le droit d'entrée en Fac;
il n'a plus ce caractère sélectif aujourd'hui. Dernièrement un prof de
terminale S me disait en avoir marre d'enseigner à des élèves qui savent qu'avec
une moyenne annuelle de 5 en maths ils obtiendront tout même leur
sésame. Exact mais ce diplôme n'est plus qu'un bout de papier sans valeur.
Un laisser passer pour sécher sur des bancs d’amphis surchargés d’étudiants que de nom.
Les
chiffres sont édifiants.
En 1960, le
nombre de candidats au bac était de 80710 lycéens. La réussite, toutes
séries confondues, étant de 60%, nous sommes en droit de considérer qu'une
grande partie des 59287 lycéens récompensés de leur travail par l'obtention du
bac envisageait d'entamer des études supérieures, soit un chiffre correspondant
à 8% du nombre de reçus au bac l'an dernier. Ils ont été près de 600000 à
l'obtenir en 2017. A eux seuls ces chiffres expliquent le malaise si on les
compare avec les places créées dans le supérieur depuis 50 ans. Beaucoup de
choses ont changé depuis Napoléon; il créa en 1808 un diplôme d’études supérieurs
limité aux élites pour former des cadres dont l’Etat avait besoin : le
baccalauréat. Il concernait qu'1% d'une classe d'âge à l'époque. Aujourd'hui,
le nombre de bacheliers approche les 80% (77,3% en 2014). Ajoutons que 30% sont
issus de la filière professionnelle et 20% de la filière technologie, ce qui
sous-entend une grande hétérogénéité de niveau et de connaissances à l'entrée à
l'université. Notons également qu'en 2014, 85,6% des garçons ont été reçus
contre 90,3% de filles. Les choses ont bien changé depuis 1861, année où une
seule femme, Julie Victoire Daublé, obtenait le diplôme. En revanche elles ne
sont que 17% à Polytechnique mais elles sont majoritaires dans nombre de
filières jusqu'alors masculines. Le pourcentage de filles atteint 80% dans les
promotions de la filière magistrature et dépasse les 50% dans la filière santé
bien que les garçons soient encore majoritaires (60%) en chirurgie par exemple.
Des chiffres
révélateurs.
Certes l'égalité
des sexes est globalement respectée au niveau des résultats, mais
nous pouvons tout de même penser que le travail lié souvent à une plus grande
maturité de la gente féminine à 18 ou 20 ans porte ses fruits... il est fort
heureux que le travail soit récompensé. En revanche il serait dommageable
qu'une sélection à l'entrée à l'université prime seulement le travail
sans tenir compte du potentiel de chaque bachelier car il est important
que l'équilibre entre les sexes soit maintenu. Il l'est aujourd'hui mais
le nombre de garçons à l'entrée à l'université bénéficie du sex-ratio qui est
de 105 garçonnets pour 100 fillettes à la naissance. Ce sujet est difficilement
abordable par les temps qui courent... aussi contentons nous de nous limiter
aux modalités d'entrée à l'université qui ne sont guère acceptables en l'état
actuel car le problème à l'entrée à l'université n'est pas une question de sexe
mais de filière. Les résultats évalués par l'université de Cergy-Pontoise sont
édifiants. Le pourcentage d'étudiants issus de la filière professionnelle
en 1ère année de lettres et de sciences humaines est passé de 7% en 2009 à
16% aujourd'hui, de 9% à 15% en économie gestion, à 9% en langues et à 5% en
droit. Les bacs technos représentent 16 à 19% en lettres, droit et sciences éco
et près de 25% en langues.
Les
résultats sont consternants.
On
frôle les 0% de réussite en première année pour les bacs pros dans toutes les
filières (1 succès sur 50). Pour les bacs technos, c'est guère mieux: 20% en
lettres, 16% en langues, 9% en droit ou en sciences, 5% en économie. La raison
de ce constat est évidente: l'orientation. Les étudiants issus du bac général
sont plus nombreux à se diriger vers les IUT et BTS d'où ils sortiront
avec un diplôme directement monnayable sur le marché du travail, les bacs pro
s'en trouvant évincés. Ils s'orientent alors par défaut vers d'autres filières
plus conceptuelles qui ne leur correspond pas. Pour autant l'orientation dans
le secondaire, au collège comme au lycée, est l'une des causes majeures de
cette situation. Au Québec l'orientation s'organise et se prépare dès l'entrée
en 6ème afin qu'elle soit réellement motivée. Un bachelier professionnel option
cuisine n'entre pas en fac d'histoire sous prétexte qu'il aime lire des
ouvrages sur les guerres napoléoniennes. En France, les filières audiovisuelles
et du spectacle très prisées débouchent souvent sur une impasse. Si l’on a pas
des parents fortunés ou ayant de bonnes relations, c’est la galère assurée
alors que des métiers dans les branches d’avenir comme le développement durable
sont délaissées L'objectif d'une bonne orientation est de faire prendre
conscience aux jeunes de leurs goûts et de leurs sensibilités, de leur
potentiel et de leurs résultats afin de les mettre en adéquation le
moment venu pour choisir positivement leur voie. Alors qu'en est-il de la
sélection à l'entrée à l'université? Il faut tout simplement tenir compte du
bac obtenu d'autant plus que l'université n'a pas été conçue pour les filières
professionnelles. Le bon sens doit prévaloir dès lors qu'il permet l'exception.
Document étayé par des chiffres. Sans commentaires. Ils parlent d'eux mêmes
RépondreSupprimerTrès bien le titre, ô combien révélateur ! On ne peut s'empêcher de penser que les parents de certains élus à la grosse tête auraient dû formuler cette injonction...
RépondreSupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
SupprimerLes diplômes ne font pas tout fort heureusement et je ne suis pas sûr que le bac d'aujourd'hui soit une référence. Comme Ferry le dit, il suffit d'en faire la demande pour l'obtenir
RépondreSupprimerCe commentaire a été supprimé par l'auteur.
SupprimerUn minimum de connaissances et d'expériences serait tout de même bien. Le paraître n'est pas suffisant
RépondreSupprimerLe problème est que chaque réforme mettra quelques années à produire ses effets.
RépondreSupprimerAujourd'hui il y a embouteillage dans les filières générales.
Il faut donc bien une forme de tri à l'entrée pour éviter de voir un bac pro menuiserie en fac de philo et un bac littéraire en BTS technologique faute de place en Fac.
La lettre de motivation pourrait palier au défaut d'orientation.
Et on peut imaginer qu'un enfant de 6eme ne soit pas en mesure de se projeter dans sa future vie d'adulte. Est-ce que le système est mieux placé avec tous les risques de catalogage (on connaît tous des professionnels à l'esprit étriqué) ? Et ne parlons pas des parents qui souhaitent souvent vivre leur vie au travers de leurs enfants sans considérer leurs envies et sans objectivité sur leurs capacités.
La difficulté pour toute réforme est que l'expérimentation implique potentiellement de la casse pour plusieurs générations d'adolescents.
Vous même n'apportez pas de solutions même si vous posez parfaitement les problèmes.
Cdt
Le PARAÎTRE, le mot est dans l'air du temps. Un temps où beaucoup de bacheliers font autant de fautes d'orthographe qu'il y a de poissons dans l'eau. Où certains élus que nous ne nommerons pas, ont eu la chance d'être au bon endroit au bon moment mais leurs compétences resteront toujours légendaires.C'est pourquoi il leurs reste le PARAÎTRE !
RépondreSupprimerQuel rapport avec la choucroute ?
SupprimerUne thèse, un diplôme universitaire ne rend pas intelligent. Lui ne s'était pas trompé de filière. Frustré, il avait besoin de reconnaissance faute d'en avoir reçu de ses pairs.
Il vit sur le rejet des autres, il finira seul et détesté. Les masques finissent toujours par tomber.
C'est du charabia loin du sujet de l'article les deux derniers commantaires
RépondreSupprimerLe sujet que vous abordez est fondamental. L'intelligence est multiple. Chaque forme n'a pas besoin de l'université pour s'exprimer et donner toutes les chances de réussir au jeune bachelier. En fait le baccalauréat doit être un diplôme de fin du secondaire et d'ouverture vers des études supérieures. Pourquoi ne pas mettre deux types d'épreuves au bac, celles qui vont cloturer un cycle et celles, sous formes d'options qui vont ouvrir vers des études en adéquation avec les qualités intellectuelles ou techniques du lycèen?
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