Beaucoup de bruit pour rien penserait Shakespeare...les enseignants sont déjà notés sur 40 points par leurs proviseurs ou principaux pour le volet administration et sur 60 points par un inspecteur pédagogique régional de leur discipline pour leurs qualités pédagogiques qu'il apprécie in situ, pendant un cours, et note après entretien. Évidemment, si le cours est raté pour une raison ou une autre, l'enseignant devra attendre une autre inspection pour espérer remonter sa note...Il arrive qu'il attende près de dix années!
Dès lors son évolution de carrière et, par là même, son salaire dépendra de sa note administrative; défavorisé par sa note pédagogique, il ne progressera plus qu'à l'ancienneté et inversement si sa première note est excellente d'autant que baisser une note dans l'Education Nationale n'est pas simple...Le système n'est donc pas satisfaisant mais il semble que l'on s'en soit accommodé.
Luc CHATEL, ministre de l'Education Nationale veut changer les choses. Désormais, c'est le chef d'établissement qui décidera de la note pédagogique, aidé par un inspecteur s'il l'estime nécessaire, après avoir assisté à trois cours de l'enseignant pendant l'année.
Les syndicats n'ont pas été longtemps à réagir... Quelle aptitude possède un chef d'établissement pour juger un professeur sur ses qualités pédagogiques et sa manière d'enseigner? Qui plus est, lorsque cette autorité hiérarchique ne vient pas du même corps... De fait, depuis plusieurs années, un conseiller d'orientation ou d'éducation, qui n'a jamais enseigné, peur être patron d'un collège ou d'un lycée...de même, un instituteur promu au grade de proviseur ou de principal pourra noter un agrégé.
Enseigner est un art mais les méthodes de diffusion du SAVOIR peuvent être très différentes, selon la personnalité du professeur mais aussi de son public. De plus, la connaissance n'est pas essentielle aux yeux de tous. MONTAIGNE pensait qu'une tête bien faite vaut mieux qu'une tête bien pleine, l'éducation consistant d'abord à donner à l'enfant les moyens de son autonomie pour acquérir le savoir. En revanche, un proverbe arabe dit qu'un sac vide ne tient pas debout. C'est aussi le bon sens.
En fait, la méthode ne fait pas tout. La pédagogie doit s'accompagner de beaucoup de psychologie; le professeur doit-être capable de s'adapter à son public et son rayonnement personnel favorise largement la relation enseignant-enseigné, souvent fondamentale dans les apprentissages. On ne va pas en classe la peur au ventre... de même on n'apprend rien dans le bruit.
Il n'est pas certain qu'un inspecteur puisse cerner toutes les qualités d'un professeur pendant une heure de cours d'autant que depuis de nombreuses années, il est averti de la date d'inspection... La pièce de théâtre, bien préparée, peut plaire si elle est jouée par un bon acteur et si le public est attentif... devant une "autorité" inconnue, les élèves peuvent être aussi comédiens et se tenir à carreau.
Néanmoins, il n'est pas évident pour un chef d'établissement de noter "son professeur"...Même s'il a des éléments concrets pour étayer son avis au cours de l'année; le nombre de devoirs et de notes, les avis sur les élèves, son autorité ou son laxisme, les résultats comparés de ses élèves sont aussi des critères d'appréciation pédagogique. Inconsciemment, il peut être influencé par les échos qui émanent de la communauté scolaire, élèves, parents, collègues..plaire n'est pas toujours un signe de qualité.
Enfin, l'évolution de carrière étant gérée au niveau rectoral, il importe qu'une partie de sa notation soit évaluée à une échelle régionale par une autorité dont la vision n'est pas limitée à celle de l'établissement.
C'est la quadrature du cercle devant laquelle se trouve Luc CHATEL. A l'évidence, la note pédagogique ne peut être mise sans un dialogue entre l'inspecteur et le chef d'établissement. Dans une période de suppressions de postes, en aura t-il les moyens. Il faudrait dans ce cas que le corps d'inspection ne soit pas touché, lui aussi.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire