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vendredi 2 mars 2012

Présidentielles: où va l'éducation?


    Nicolas SARKOZY a décidé cette semaine de mettre d’actualité cette question de Jean PIAGET « Où va l’éducation ? » Sujet particulièrement sensible sur lequel il ne souhaite pas être en reste. Commençons d’abord par donner quelques chiffres pour comprendre l’ampleur du phénomène. L’éducation concerne quasiment ¼ de la population : 6,64 millions d’élèves dans le primaire, 4,63 millions dans le second degré, 2,23 millions dans le supérieur et 330.000 apprentis. En 20 ans, cette population a baissé de 540.300 élèves et étudiants. Pour faire avancer la machine,  près d’un million de fonctionnaires se consacrent à l’éducation dont 87% d’enseignants entraînant  une augmentation de 33.792 professeurs dans le même temps. Quant au budget de 2012, il a progressé de 5,6% depuis 2007 pour atteindre 61 milliards d’euro auxquels s’ajoutent les dépenses des collectivités locales et territoriales. A titre d’exemple, pour le primaire, la part des collectivités locales représente 45% de la dépense totale, soit 20% pour l’ensemble des collectivités.
Pourtant, en dépit de ces efforts financiers les résultats sont décevantsLa France fait figure de mauvaise élève, se plaçant entre la 21ème et 27ème place pour la lecture, les mathématiques et les sciences, loin derrière les pays asiatiques, HONG-KONG, la Corée du sud, le Japon concurrencés aux premières places par la Finlande et le Canada. A contrario de l’Allemagne dont les réformes entamées depuis ces dix dernières années ont été efficaces, la France, elle, n’a pas réagi à cette enquête PISA. Et pour noircir le tableau, 10 à 20% des enfants qui entrent en 6ème ne savent pas lire. Sans parler des 20% d’élèves d’une tranche d’âge qui sortent du système scolaire sans diplôme.
Face à de tels  scores deux attitudes s’opposent ; celle de Nicolas SARKOZY d’abord qui prétend, chiffres à l’appui, que le nombre d’enseignants ne change pas les choses; Pourquoi les enseignants seraient-ils moins bons qu’hier ?  Et celle de François HOLLANDE qui prétend le contraire avec la promesse de créer 60.000 postes supplémentaires pendant son mandat. François BAYROUlui, estime que le système éducatif a atteint ses limites et qu’il est possible de faire mieux avec les moyens actuels, estimant,  « qu’il vaut mieux penser le changement que changer le pansement » et d’ajouter que la qualité des enseignants n’est pas à remettre en cause.
Une politique pour « en Saigner » les profs
Après avoir lancé une offensive sur les chômeurs et les Smicards, Nicolas SARKOZY s’attaque aux enseignants avec des arguments toujours aussi simplistes tels que: « On peut en réduire leur nombre puisque les résultats ne suivent pas ». Faute d’idées, et encore moins de pistes, il propose maintenant 500 € de plus par mois à ceux qui voudraient bien travailler 8 heures de plus par semaine. Seulement voilà, la réussite scolaire n’est pas seulement qu’une affaire d’argent. Le corps enseignant n’est pas consumériste. Mais ne soyons pas Cassandres, et imaginons que 10% d’entre eux acceptent. Avec une offre à 500 euros par mois,  il devient plus généreux que François HOLLANDE avec ses 60.000 emplois. Décidément, l’école ce n’est pas leur truc !  Au diable l’avarice ! Quelle dérision!
La réduction des vacations, l’engagement et l’efficacité des profs n’est pas qu’une question de salaire ;le malaise  du corps enseignant est bien plus profond qu’il n’y parait. La faute à qui ? En trente-ans, Le système éducatif à la française a perdu de ses valeurs et ne s’est jamais remis en cause. Toucher au monde éducatif c’est marcher sur un champs de mines. La France a toujours eu un problème avec l’éducation nationale. Tant avec son personnel qu’avec les organisations de parents d’élèves. Les maladresses en la matière font florès.  Souvenons nous celles menées sous Jacques Chirac en 1986 avec la loi Devaquet qui faillît le faire tomber. A l’origine, toujours le même scénario: l’attitude rigide de l’état, soumis à une idéologie utopique et perverse qui refuse de prendre en compte les différences, les goûts et les aptitudes de chacun. Tous les enfants ne peuvent pas être « construits » dans le même moule avec les mêmes méthodes. Seul Jack Lang n’a pas eu à croiser le fer avec l’éducation. Il faut dire qu’il n’a jamais eu l’audace de faire des réformes.
C’est à croire que les ministres qui se sont succédés depuis les années soixante sont animés de la même idéologie: associer leur nom à une réforme. Même inapplicable... Et pour couronner le tout, ils se font conseiller par des inspecteurs généraux cacochymes qui sévissaient déjà sous Jules Ferry… Oui, l'éducation en France est entièrement à repenser. Le principe du nivellement par le bas en laissant les plus démunis sur le bas côté de la route ne marche pas. Donner  le minimum culturel à tous, tel était l’objectif que s’étaient fixés nos brillants pédagogues depuis des années. On en voit le résultat aujourd’hui. Le collège unique est devenu  une sorte  d’entonnoir dans lequel tous les élèves doivent entrer. Y compris ceux de SEGPA. Mais le passage est trop étroit,  il refoule. Alors que faire du trop plein pour en sortir « tous ensemble » après la 3ème ? Il faut voir le désarroi des profs devant des classes surchargées dont l’hétérogénéité se transforme en un capharnaüm  propice au chahut et à l’indiscipline.
Peu à peu, insidieusement, l’éducation a été taillée en pièce, dépecée en petits morceaux : temps scolaire réduit, programmes édulcorés, dévalorisation du métier d’instituteur, et de professeur auxquels on demande de faire des efforts; avec 26 heures ils devront de surcroît, en milieu rural, travailler sur 3 établissements. Si tant est qu’avec la réforme territoriale que le gouvernement nous concocte, on en supprime 2 sur 3.  Difficile dans ces conditions  de s’impliquer  dans un projet au sein d’un foyer socio-éducatif ou de clubs.
L’heure est grave. Il faut arrêter ces expériences stupides. « L’enfant n’est pas un vase que l’on remplit mais un feu qu’on allume » pensait Rabelais. « Ce que tu souhaites enflammer chez les autres doit d’abord brûler au fond de toi-même » pensait aussi St Augustin. Si nous voulons l’excellence, il faut s'en donner les moyens, et arrêtons de jouer les docteur Follamour avec l’éducation.  Attachons nous plutôt à raviver la flamme des enseignants si nous voulons qu’ils continuent à éclairer les élèves.

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